Engagée dans la transition énergétique dans l’UEMOA, la BOAD, appuyée par ses partenaires, veut accélérer le rythme de ses investissements dans les énergies renouvelables, en ligne avec son plan stratégique Djoliba. Cependant, le défi reste entier face à un déficit énergétique criant.
Le jeudi 27 juin dernier, la BOAD a annoncé qu’elle prévoyait d’injecter 15,5 milliards de FCFA dans la construction et l’exploitation d’une centrale photovoltaïque dans le nord de la Côte d’Ivoire, couvrant près de la moitié du coût total de l’infrastructure. Ce financement s’ajoute à une série d’engagements pris par la banque de développement depuis le lancement du plan Djoliba en 2021. Ce programme d’investissements quinquennal, initié par Serge Ekué (photo), le président de l’institution, cible notamment le secteur de l’énergie, en particulier les énergies renouvelables, dans une région où le déficit énergétique continue de peser lourdement sur la croissance et constitue un frein à l’industrialisation. Alors même que le potentiel de la région est estimé à 517 000 GWh pour le solaire photovoltaïque, 310 000 GWh pour le solaire thermodynamique, 2 367,76 GWh pour l’hydroélectricité, 75 GWh pour l’éolien, avec des ressources disponibles en hydrogène et biomasse, on est encore bien loin de l’objectif commun fixé par les États de parvenir un taux d’électrification de 100 % d’ici 2033.
Accélérer le financement des énergies renouvelables
Pour l’institution de développement, l’objectif est clair : accélérer les investissements dans le secteur de l’énergie, notamment les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, comme le détaille le troisième axe stratégique du Plan Djoliba. L’ambition est de taille : financer, entre 2021 et 2025, l’installation de 380 MW de capacité additionnelle, dont 39 % d’énergies renouvelables, pour un montant prévu de 497,3 milliards de FCFA. Selon des sources au sein de la banque contactées par l’Agence Ecofin, la banque déploie activement son plan, ayant déjà investi dans plusieurs projets tels que la centrale solaire photovoltaïque de Blitta au Togo, la centrale hydroélectrique de Kourouba au Mali, et d’autres à Awandjélo au Togo et à Koudougou au Burkina Faso (20 MW), ainsi que la centrale solaire de Niakhar au Sénégal (30 MWc). Ces investissements s’ajoutent à un portefeuille de projets existants, dont la centrale solaire d’Akuo Kita Solar au Mali (50 MWc) en exploitation et divers projets d’électrification rurale décentralisée par système solaire photovoltaïque au Togo (317 localités), au Mali (50 localités avec l’appui du Fonds Vert pour le Climat), au Sénégal (1000 localités avec l’appui du FVC) et au Niger (47 localités), tous en cours d’exécution. À la fin de 2023, la banque a augmenté la capacité d’énergie électrique installée depuis 2021 à 235,9 MW, avec une part d’énergies renouvelables de 115,9 MW, soit 41,7 % de la capacité installée. Plus de 74 milliards de FCFA ont été injectés dans les énergies renouvelables, représentant 26 % des investissements de la banque dans le secteur de l’énergie, portant ses engagements dans le secteur énergétique de l’UEMOA à 1 471 milliards de FCFA, soit 18 % de ses concours globaux.
Financement mixte et soutien des partenaires
À un an de la fin du plan stratégique, l’institution accélère la cadence de ses engagements. « Notre Stratégie Environnement et Climat 2021-2025, issue du Plan Djoliba, prévoit une accélération des investissements climatiques dans la zone UEMOA, notamment dans le financement des énergies renouvelables », a-t-elle déclaré. En réponse, elle a intensifié ses activités de mobilisation de ressources et d’optimisation de son bilan ces dernières années pour répondre à l’appel. Capital hybride, assurance-crédit, titrisation, augmentation de capital, ressources du fonds vert, blended finance, la BOAD augmente sa capacité et son spectre d’intervention. Par exemple, en plus de ses ressources propres, dont 25 % sont dédiées aux actions climatiques, « la banque s’emploie à mobiliser des fonds auprès de sources climatiques, plus concessionnelles en nature (taux plus bas et maturités plus longues), et parfois même des dons pour accompagner les États membres de l’UEMOA ». Il s’agit d’une « approche de financement mixte avec de nouveaux instruments financiers pour accroître les investissements dans les énergies renouvelables », explique-t-on à la BOAD. Les institutions de financement affluent. « Nous collaborons avec des partenaires financiers de premier plan, comme la Banque Mondiale, la BAD, l’AFD, l’UE, KFW, le Fonds Vert pour le Climat (FVC), le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) ».
Appui technique pour catalyser des fonds
Dans nombre de cas, l’institution qui a acquis de la réputation sur les aspects techniques, est utilisée pour la mise en œuvre de la plupart des fonds Climat, notamment le Fonds Vert pour le Climat, le Fonds d’adaptation, et le Fonds pour l’environnement mondial. C’est ainsi que le Sénégal a réussi à mobiliser plus de 60 milliards de FCFA auprès du FVC pour deux projets solaires, avec l’appui de la BOAD. Le Programme de Promotion des Investissements Privés dans le secteur des Énergies Solaires (PPIPS), qui vise à financer des projets solaires dans six pays (Bénin, Burkina, Guinée-Bissau, Mali, Niger et Togo) est un exemple. Ce programme représente un investissement de près de 165 milliards de FCFA, auxquels la BOAD contribue à hauteur de 40 milliards de FCFA et le Fonds Vert pour le Climat à hauteur de 40 milliards de FCFA (37,39 milliards de prêt concessionnel et 2,62 milliards de FCFA de don) pour boucler le financement. Les institutions financières locales et les acteurs privés participeront à hauteur de 83,96 milliards, soit 50 % du coût global du projet. Cet aspect de son engagement devrait se renforcer. Car, en juillet 2023, la banque a été réaccréditée au Fonds vert pour le climat, avec un niveau de réaccréditation relevé, lui permettant de mobiliser ou de gérer des enveloppes de plus de 200 millions de dollars par projet.
Le gaz reste une énergie de transition
Mais le pari de la BOAD n’est pas seulement axé sur les énergies renouvelables. À son QG à Lomé, on insiste sur le fait que le gaz restera une énergie de transition, notamment en raison de la découverte récente d’importantes réserves de gaz dans la sous-région, notamment en Côte d’Ivoire. « Dans le cadre d’une juste transition, le plan Djoliba prévoit l’installation de 380 MW de capacités supplémentaires, dont 39 % d’énergies renouvelables, ce qui implique que les 61 % restants pourront être produits par d’autres sources, telles que le gaz naturel », précise l’institution de développement.
Avec ECOFIN