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Sénégal : Une élection présidentielle pour deux dates, Macky Sall et le Conseil constitutionnel sèment la confusion

Au Sénégal, les électeurs se retrouvent dans une confusion totale en ce qui concerne la date de la tenue de la Présidentielle. Si pour le président Macky Sall a annoncé la date du 24 mars 2024, le Conseil constitutionnel, lui, fait savoir que l’élection présidentielle sera organisée le 31 mars 2024. Deux dates distinctes. Une situation qui risque d’occasionner la cacophonie.

Ces dernières 24 heures, les choses se sont vite accélérées à Dakar. Dans la soirée de mercredi 6 mars 2024 en soirée, en moins d’une heure, une décision du Conseil constitutionnel est tombée, avec aussi l’annonce par l’exécutif d’une nouvelle date pour la présidentielle, après un report du scrutin qui a plongé le pays dans une crise politique inédite. Le président sortant, Macky Sall, a annoncé la date du 24 mars. Mais le Conseil constitutionnel, lui, table sur le 31 mars.

Bien avant, une décision du Conseil constitutionnel qui rejette la proposition de reporter la présidentielle au 2 juin 2024. Saisis par le président Macky Sall pour avis, conformément à la Loi, les Sages ont au président de la République que le mandat du chef de l’État prenait fin le 2 avril 2024, et qu’il ne lui était donc pas possible d’organiser un scrutin après cette date-butoir. Et après vint le rejet de la possibilité par le président sortant d’assurer l’intérim si un nouveau chef de l’État ne devait pas encore avoir été élu à la date du 2 avril.

Enfin, le Conseil constitutionnel décide que la liste des 19 candidats à la présidentielle reste la même ; exit la possibilité du réexamen de la candidature de Karim Wade, comme le demandait le PDS qui a été exclu de la course, ou encore Ousmane Sonko.

Les sages ont précisé que les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours, estimant que toucher à la liste des candidats n’est pas constitutionnel. Bassirou Diomaye Faye, par exemple, reste donc le candidat de l’ex parti Pastef d’Ousmane Sonko.

Les réactions n’ont pas tardé. Maguette Sy, secrétaire national chargé des élections du PDS et mandataire national de la coalition Karim 2024, a rapidement réagi dans la soirée.

« Concernant la liste des candidats, je note que le Conseil reste sur sa position, ce qui confirme son combat contre Karim Wade. C’est le Conseil constitutionnel lui-même qui s’est érigé en commando anti-Karim Wade. Ça, je le note », a-t-elle déclaré.  Cela implique également que les candidats vont devoir se mettre d’accord sur une durée de campagne raccourcie.

Présidentielle le 24 ou le 31 mars ?

Après la décision des Sages de retoquer la proposition de report de la présidentielle au 2 juin, le président Macky Sall dit avoir pris note et rend publique la nouvelle date de la présidentielle : ce sera le dimanche 24 mars, dans un peu plus de trois semaines. Le président a également dissout son gouvernement. Sidiki Kaba, ministre de l’Intérieur, remplace à la Primature Amadou Ba, qui est aussi le candidat à la présidentielle de la coalition au pouvoir, Benno Bokk Yakaar, officiellement pour le libérer pour mener campagne.

Mais quelques minutes plus tard, nouveau rebondissement : le même Conseil constitutionnel, dans une autre décision sollicitée par plusieurs candidats à la présidentielle, fixe le scrutin au 31 mars. Cette date fixée pour « pallier l’inertie des autorités compétentes ». Sauf qu’entre-temps, le président Macky Sall a tranché. Et la présidence assure que c’est la date choisie par le président qui est la bonne.

Selon Maguette Sy, la loi électorale est violée. « Pour la date de l’élection, il appartenait au président de fixer la date de l’élection, mais maintenant, le problème qui se pose, c’est le décret qui convoque le corps électoral. Là, on viole la loi électorale qui dit qu’entre la date de l’élection et le décret qui fixe la convocation du corps électoral, il doit se passer au moins 80 jours. Alors le Conseil constitutionnel rappelle toujours les dispositions de la Constitution, mais, ici, on viole la loi et tout le monde se tait. C’est du n’importe quoi. Donc moi, je sais que le président qui sera élu sera un président illégitime »,

Si les candidats à la présidentielle se disent un peu perdus, tous semblent confiants que la confusion sera réglée dans la journée. Puisque la revendication essentielle du Conseil constitutionnel et de l’opposition est respectée : le scrutin aura lieu avant le 2 avril, date de la fin du mandat de Macky Sall.

« On est satisfait puisque la date est avant le 2 avril »

Abdou Mbow, président du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar qui avait pourtant voté en faveur d’un report de la présidentielle, n’est pas surpris : « Le Sénégal, c’est une grande démocratie. Énormément de personnes ont cru que ce pays allait aller en lambeaux. Aujourd’hui, vous avez vu que la démocratie fonctionne et on verra avec la suite des événements. »

Pour Abass Fall, député de l’ex-Pastef, c’est la confusion : « 24 ou 31 mars ? Nous sommes dans un imbroglio total. » Ayib Dafe, un autre député du même parti, temporise : « On est satisfait puisque la date est avant le 2 avril. Maintenant, il faudrait que l’on concilie les deux dates entre la date du gouvernement et celle du Conseil constitutionnel, ça fait un peu désordre. En tout cas, nous sommes prêts pour aller à l’élection présidentielle, car c’est ce qu’on a toujours demandé. »

« On vient de découvrir que l’on a trois pouvoirs et que la justice est un pouvoir indépendant qui peut arbitrer et réguler le jeu électoral, se félicite le candidat à la présidentielle, Thierno Alassane Sall. Maintenant, il est déplorable que le Conseil constitutionnel a pris tout ce temps-là. »

Pour Babacar Gueye, le président de la plateforme Aar sunu elections, cette annonce sonne comme une victoire de ce collectif : « Nous avons mis en place cette plateforme pour que justement l’élection se tienne avant la fin du mandat de l’ancien président de la République. Donc le Conseil constitutionnel nous a suivi dans cette conviction et c’est une grande satisfaction pour nous. Nous sommes un peu plus rassurés, mais s’il y a un deuxième tour, ce deuxième tour risque d’enjamber la fin du mandat du président de la République. Et donc il y a encore une incertitude qui plane. »

C’est en tout cas un véritable coup d’accélérateur qui est donné au processus électoral ce mercredi soir, alors que le pays traverse une crise politique sans précédent depuis le report de la présidentielle.

Et dans le même temps, l’Assemblée nationale a adopté une loi d’amnistie pour les crimes commis entre février 2021 et 2024, en lien avec des manifestations ou des accusations politiques.

Avec rfi

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